Sophie Blitman

Auteur : Sophie Blitman

Interview de Sophie Blitman pour Moi, Themba

Pour son premier roman jeunesse, Sophie Blitman a choisi un sujet engagé : l’Apartheid. Elle nous raconte le cheminement de l’histoire de Themba, son héroïne, et se confie sur le rôle essentiel de la littérature pour faire avancer le monde.

Qui est Themba ?

Une adolescente qui se bat contre le racisme. Elle vit en Afrique du Sud dans les années 1970, à une époque où le régime politique de l’apartheid interdit aux Noirs de se mélanger aux Blancs. Themba fait partie des premiers. Elle est obligée, pour cette raison, d’habiter à Soweto, une banlieue pauvre où règne la peur des contrôles policiers.

En grandissant, elle prend conscience de l’injustice de cette situation. Choquée et désorientée, elle est tiraillée entre son envie d’indépendance et ses parents qui la maternent, entre son frère Waldo, très engagé en politique, et son amie d’enfance Caitlin qui, au contraire, s’en désintéresse totalement. Encore plus que d’autres adolescents, Themba doit s’affirmer pour trouver sa voie.

Comment vous est venue l’envie de raconter son histoire ?

Il y a quinze ans, j’ai fait un voyage en Afrique du Sud qui m’a profondément marquée et j’ai continué à suivre l’évolution de ce pays. Aujourd’hui, trente ans après l’abolition de l’apartheid, les inégalités entre Noirs et Blancs sont toujours fortes. Il m’a paru d’autant plus important d’en parler aux jeunes, ici et maintenant, que le racisme existe partout dans le monde.

Raconter l’histoire d’une adolescente m’a paru un bon moyen de le faire car on s’attache à elle, on partage ses passions et ses doutes. C’était aussi une façon rendre hommage aux lycéens et étudiants sud-africains qui se sont battus pour la liberté, parfois au prix de leur vie. Si Themba est un personnage de fiction, son histoire s’inspire de faits réels.

Comment avez-vous trouvé sa « voix » ?

Je me suis plongée dans cette période, à travers des films, des livres mais aussi et surtout des échanges avec des femmes noires qui ont vécu à Soweto. Une partie de leurs récits transparaît dans la voix de Themba qui reflète également les questionnements d’une adolescente en quête de repères.

Une héroïne noire comme Themba, c’est encore rare dans la littérature. Avez-vous l’impression que les choses sont enfin en train de changer ?

En ce qui concerne la place des femmes, oui : même si les clichés sont encore trop nombreux, la littérature jeunesse ne se contente plus, heureusement, de faibles jeunes filles qui regardent agir des héros courageux !

En revanche, la question raciale reste délicate : il y a peu de personnages noirs, c’est vrai, et ils ne sont pas toujours bien accueillis. Prenez l’exemple d’Alma : en racontant le destin d’une jeune Africaine au temps de l’esclavage, Timothée de Fombelle a été accusé de s’approprier une histoire qui ne lui appartiendrait pas ! Cette polémique prouve qu’il reste du chemin à faire pour que les relations entre Noirs et Blancs se normalisent. Mais il faut que les mentalités évoluent, il faut combattre le racisme, et je suis convaincue que les livres participent de ce changement.

On peut lire sur votre site votre mantra « Raconter des histoires, former des citoyens », c’est important pour vous de transmettre des messages à travers vos livres ?

Raconter des histoires, c’est bien sûr et avant tout ouvrir une fenêtre sur l’imaginaire, mais c’est aussi le meilleur moyen d’attraper les lecteurs pour aiguiser leur regard sur le monde et les aider à devenir des citoyens à part entière : voilà ce que je m’attache à faire dans mes livres.

Quelle vision avez-vous de cette nouvelle génération ?

Les jeunes d’aujourd’hui grandissent dans un monde en profonde mutation : le numérique a transformé les relations sociales, en facilitant les liens mais en renforçant parfois aussi le sentiment de solitude, tandis que le changement climatique menace l’avenir de la planète. Face à ces enjeux, la nouvelle génération est pleine de ressources. À nous de l’éduquer et d’allumer la flamme pour lui donner à la fois l’envie et les moyens d’agir.

Que représente pour vous le fait d’être publiée chez France Loisirs ?

Après avoir moi-même lu des livres conseillés par le Club quand j’étais petite, je suis très heureuse d’en faire aujourd’hui partie en tant qu’autrice ! J’espère que cela permettra de toucher de nombreux lecteurs, un peu partout en France, qui n’auraient peut-être pas eu l’idée d’acheter ce livre.

Un mot pour vos lectrices et lecteurs ?

Lisez ! De tout : des romans, des documentaires, des BD, des polars… Essayez de nouveaux genres jusqu’à trouver ceux qui vous plaisent, sautez des lignes si un passage vous ennuie. Profitez de ce moment hors du temps où l’on est tellement absorbé par son livre qu’on en oublie tout le reste : la vraie vie est encore plus savoureuse et plus riche quand on y revient ensuite, la tête remplie d’histoires.

Merci !

  • Moi, Themba
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    Moi, Themba

    Prix public : 12,90 €
    Themba, 12 ans, vit à Soweto, en Afrique du Sud. En prenant conscience de l’injustice de l’apartheid, elle va se révolter aux côtés de tout un peuple. Avec ce roman, découvre le.